Quand le prix triple, produire et consommer : un choix payant

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Quand le prix triple, produire et consommer : un choix payant

Les trois frères Bécuwe installés en maraîchage et grandes cultures dans l’agglomération dunkerquoise on fait poser 300 m² de panneaux photovoltaïques il y a un an et demi.

Les trois frères du Gaec Becuwe, situé à Hoymille dans le Nord, profitent de leur installation de panneaux photovoltaïques depuis un an et demi. Maraîchers et producteurs de pissenlits blancs, ils consomment beaucoup d’énergie pour la conservation et la production de leurs marchandises. Avec un prix de l’électricité aussi élevé, la production d’énergie n’a jamais été aussi rentable.

Au regard des prix de l’électricité en 2023, on peut dire que le Gaec Becuwe, dans le département du Nord, a eu le nez creux en 2021. Cette année-là, il ont décidé d’installer des panneaux photovoltaïques pour leur propre consommation. « Mais nous n’en avons pas posé assez, tempère Matthieu Becuwe, l’un des trois frères qui gèrent l’exploitation. Il y a des périodes de l’année, comme en ce moment, où nos panneaux ne produisent presque rien. »

Faible production en hiver

Il faut dire que dans le Nord, où sont installés ces maraîchers, les journées peuvent être peu lumineuses et courtes. En cette fin d’après-midi du 23 février, chacun des deux onduleurs indique une production 1,4 KWa alors que leur capacité est de 20 KWa. Pour le moment, leur production d’électricité est restreinte.

Les trois frères installés en maraîchage et grandes cultures dans l’agglomération dunkerquoise on fait poser 300 m² de panneaux photovoltaïques il y a un an et demi. « Nous les avons installés sur la toiture d’un bâtiment de quinze ans, explique Matthieu Bécuwe. Il est orienté sud-ouest ce qui permet de capter la lumière longtemps. Seulement, il est construit avec une ossature en métal et en bois. Rien ne garantissait la solidité de la toiture. » Les trois agriculteurs ont donc choisi de ne poser des panneaux que sur les travées en métal.

panneaux photovoltaïques

Pour assurer la solidité du bâtiment, les trois agriculteurs ont choisi de ne poser des panneaux que sur les travées en métal.

Ce bâtiment abrite du matériel. Pas question, pour Matthieu Bécuwe et ses frères d’en poser au-dessus du bâtiment de stockage des légumes et pommes de terre. « Les assurances ne sont pas très favorables à ce type d’installation, fait remarquer l’agriculteur. Plus risquées, les cotisations sont alors plus élevées. »

Trois frigos et deux salles de forçage

Si la production d’électricité issue des panneaux ne suffit pas à combler les besoins de l’exploitation, c’est aussi parce que la consommation est importante. Les trois frères exploitent une vingtaine d’hectares destinés au maraîchage et aux vergers. Ils produisent également des pissenlits blancs, une sorte d’endive frisée, historiquement très implantée dans leur secteur.

salle forçage

Les deux salles de forçage doivent être chauffées à 10 °C.

Pour assurer la production et conservation de leurs produits toute l’année, l’exploitation possède deux réfrigérateurs à -3 °C, un à 4 °C et un autre à 2 °C ainsi que deux salles de forçage, chauffées à 10 °C. Sans compter les réfrigérateurs du magasin de vente directe qu’ils ont créé.

Tous les réfrigérateurs ne fonctionnent pas tout au long de l’année, mais leur consommation d’électricité est conséquente. « En 2022, nous avons consommé 259 MWh, illustre Matthieu Bécuwe. En revanche, nous en avons produit environ 58 MWh et perdu 5 MWh. » Sauf à certains pics de production, les panneaux photovoltaïques ne produisent d’électricité ni la nuit ni suffisamment dans la journée. Rien n’est revendu car les agriculteurs ne se sont pas raccordés au réseau de distribution.

Pour ce projet, le financement, en 2021 a été établi à 47 600 euros. Il a été l’un des derniers projets subventionnés par la Région Hauts-de-France. « Nous avons obtenu une subvention de 30 % dans le cadre du plan Frateri [fonds régional d’amplification de la troisième révolution industrielle], précise Matthieu Bécuwe. Ces fonds sont réservés aux projets d’autoconsommation. »

Accélération de rentabilité

En 2021, lorsque le projet est monté, l’électricité valait 5 €/kWh et le tarif de rachat était établi à 9 €/kWh. « C’était plus rentable d’utiliser notre propre électricité plutôt que de la vendre, indique l’agriculteur responsable de ce projet. Sur cette base, il fallait six ans pour que l’installation soit rentabilisée. » Entre-temps, le coût de l’électricité a bondi en 2022 à 24 €/kWh et 28 pour 2023 avec un tarif de rachat de 11 €, accélérant la rentabilité de l’outil.

En parallèle, face à l’augmentation du prix de l’électricité, les trois frères ont installé des horloges sur les réfrigérateurs afin d’essayer d’adapter leur consommation à la production. « En été, on essaie de rafraîchir nos locaux la journée et l’inverse en hiver car c’est moins cher la nuit, expose l’agriculteur. Sauf pour les réfrigérateurs où il y a de la marchandise à forte valeur qui tournent en continu. » Cependant, les agriculteurs n’ont pas encore assez de recul sur les gains réalisés grâce à ce système.

Démarche éthique

Même si les trois agriculteurs sentaient bien que l’énergie allait coûter de plus en plus cher, comme ce fut le cas pour leurs voisins belges, ils ont décidé d’installer des panneaux photovoltaïques pour d’autres raisons. La démarche se veut éthique. « Nous consommons beaucoup d’énergie pour nos productions, l’utilisation d’énergie renouvelable nous semblait pertinente, confie Matthieu Bécuwe. D’autant que nous accueillons du public à la ferme, nous devions mettre notre pierre à l’édifice dans la réduction d’utilisation d’énergie fossile. »

En plus, l’idée de maîtriser ses charges énergétiques, d’investir dans un nouvel outil de production leur parlait. Ils ont d’ailleurs un nouveau projet en tête : construire un bâtiment de stockage de matériel et ainsi obtenir une surface de 500 m² de panneaux photovoltaïques. « Avec cette surface supplémentaire, nous espérons produire la moitié de notre consommation, envisage-t-il. Le reste serait revendu. »

Pour le moment, les trois agriculteurs tentent de mettre à jour les prix déjà établis en 2021. Pour cela, ils doivent compter 100 000 euros de construction de bâtiment et presque autant pour l’installation des panneaux. « Avec ces surfaces supplémentaires, on serait capables de produire 150 KWa par an, contre 50 actuellement. Avec un coût de 28 €/kWh, ça sera vite financé. » Mais face à leur projet, les trois agriculteurs se sentent un peu seuls : pas de subventions a priori, peu d’appui technique et un constructeur débordé.

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