Des poulets chauffés par leurs fientes

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Des poulets chauffés par leurs fientes

La plateforme de compostage est située entre les deux bâtiments d’élevage de façon à limiter la distance de circulation de l’eau chaude dans le sol.

Le gaec de la Bisière dans le Maine-et-Loire capte les calories que dégage le compostage des fientes de volailles. Elles alimentent les planchers chauffants de ses poulaillers.

Les derniers lots de volailles sont partis avant Noël, il y a un mois, vers l’abattoir des Essarts de la société Arrivé (groupe LDC). Depuis, les trois bâtiments du Gaec de la Bisière, à Torfou (Maine-et-Loire) sont vides, en attendant l’accalmie de la grippe aviaire. Le premier bâtiment a la forme d’un tunnel plastique de 470 m². Il date de 1981, soit un an après l’installation de Jean-Paul Chupin sur la ferme familiale. Le deuxième (1 200 m²), de 1991, rénové en 2014, au moment de l’installation de David Lefort, gendre de Jean-Paul et Nadine.

Le chauffage ne consomme que 3,5 kg/m²/an de gaz

Pour cette rénovation, les éleveurs se sont basés sur le modèle du troisième bâtiment, construit en 2011 après l’installation de Nicolas, le fils de Jean-Paul et Nadine. Car ce dernier bâtiment avicole de 1 740 m2 se veut très économe en énergie. « Ces deux bâtiments sont bien isolés. Et ils disposent d’un plancher chauffant, explique Jean-Paul Chupin, jeune retraité depuis 2022. De plus, l’eau circulant dans les planchers valorise les calories dégagées par le compostage des fientes de volailles et fumiers de bovins. Ainsi, le chauffage des 3 410 m2 ne nécessite que 12 t de gaz par an, soit 3,5 kg/m². Cela correspond à la moitié d’une consommation classique. »

Bâtiment avicole économe en énergie : 13 km de tuyaux autour du compost

C’est donc suite à l’installation de Nicolas en 2009 que les éleveurs élaborent l’ingénieux système. L’extension de l’activité volailles prévoit à cette époque un nouveau bâtiment. Or ce projet impose la création d’une plateforme de compostage qui mettra l’exploitation aux normes vis-à-vis du plan d’épandage. Le système se met en place. Il fonctionne avec l’échange d’une partie du compost contre de la paille auprès de céréaliers. Jean-Paul Chupin observe : « Le processus de compostage génère beaucoup de chaleur. Nous avons donc réfléchi à la manière de récupérer ces calories pour les utiliser dans le chauffage du nouveau bâtiment. »

La plateforme de compostage comporte une première zone où les fientes de volailles et fumiers de bovins sont d’abord soumis durant un mois à une aération forcée par le sol. La fermentation par activité microbienne aérobie se met ainsi en route. Elle entraîne l’élévation de température qui permet l’hygiénisation des déjections. Au bout d’un mois, le compost est transféré dans une des quatre cases dédiées à la maturation. Il y restera pendant plusieurs mois.

Le sol et les murs de ces quatre cases de 100 m² chacune, contiennent un réseau de 13 km de tuyaux d’eau. Ce dernier capte la chaleur le compost dégage. Le sol ainsi que les murs périphériques sont en outre isolés de l’extérieur. L’eau est entre 35 et 45°C à la sortie du compostage. Elle circule ensuite dans les planchers des deux poulaillers. Puis elle revient au niveau de la plateforme de compostage. Sa température est entre temps redescendue à environ 30 ou 35°C.

« Un radiateur de plus de 500 t »

Globalement, l’équipement du Gaec de la Bisière a coûté plus cher bien que les associés aient compensé par une grande part d’auto-construction. En complément de la récupération de chaleur, les éleveurs ont investi dans une chaudière gaz à condensation. Avec sa puissance de 160 kW, elle fait l’appoint quand c’est nécessaire. Ainsi, en 2011, le coût au mètre carré du troisième bâtiment s’est élevé à 204 €. Le système de plancher chauffant (chaudière comprise), compte pour 44 € dans cet investissement.

Dans ce bâtiment, ainsi qu’au niveau de la plateforme de compostage (20 000 € d’investissement par ailleurs), l’épaisseur du béton au sol, comprenant les tuyaux, est de 13 cm. Elle est doublée d’une couche de polystyrène pour l’isolation. « À raison de 2,5 t/m3 de béton, cela représente un radiateur de plus de 500 t pour le bâtiment de 1 740 m2 », calcule Jean-Paul Chupin.

Récupération de chaleur de compostage pour chauffer les volailles

Durant la phase de maturation du compost, celui-ci est placé dans des cases dont le sol et les murs contiennent un réseau de tuyaux d’eau récupérant la chaleur dégagée.

Isolation et pompe à chaleur pour un bâtiment avicole économe en énergie

Côté isolation, le troisième bâtiment est paré au niveau des murs de panneaux sandwich en polyuréthane de 80 mm. Et au niveau du plafond, les panneaux sandwich de 30 mm sont doublés de 200 mm de laine de verre.

Outre l’installation du chauffage par le sol, la rénovation du deuxième poulailler en 2014 a également porté sur l’isolation : doublement des panneaux de 40 mm d’origine en toiture, et ajout de panneaux de 40 mm et de 100 mm de laine de verre aux cloisons murales de 50 mm à l’origine.

L'élevage bovin et avicole est associé à une plateforme de compostage.

Les fientes de volailles et fumiers de bovins fermentent d’abord pendant un mois grâce à une aération forcée par le sol.

Enfin, il y a cinq ans, les éleveurs ont installé une pompe à chaleur. Grâce à elle, ils récupèrent des calories au niveau du compostage, même quand la température du circuit d’eau descend au-dessous de 35°C. Ainsi ils économisent davantage de gaz. « Mais la pompe à chaleur consomme un peu d’électricité, tempère Jean-Paul Chupin. Il faut compter 1 kW électrique pour 5 kW de chaleur. »

Économie de paille

Les économies d’énergie que la ferme familiale réalise compensent finalement largement le surcoût du bâtiment. Le choix fait par les éleveurs il y a plus de dix ans se révèle particulièrement pertinent dans le contexte actuel. Jean-Paul Chupin constate en plus d’autres bénéfices. « Avec un plancher chauffant, il y a une répartition très homogène de la chaleur dans le bâtiment. La température dans le circuit d’eau doit être supérieure de 5 °C seulement à la température souhaitée dans le bâtiment. Le seul inconvénient est qu’il faut davantage de temps pour réchauffer le bâtiment après un vide sanitaire long. Nous devons anticiper de quarante-huit heures. »

Le plancher chauffant permet en outre de maintenir une litière plus sèche. Le Gaec parvient donc à économiser de la paille broyée. Maintenir une faible couche de paille est même indispensable pour une bonne diffusion de la chaleur depuis le sol. Jean-Paul Chupin estime ainsi la consommation de paille à 1,5 kg/m² par lot, contre 4 à 5 kg dans un bâtiment classique. Des tests et les observations des éleveurs, montrent enfin moins de problèmes de pododermatites chez les volailles.

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