Prix des engrais : pas de baisse à court ou à long terme

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Prix des engrais : pas de baisse à court ou à long terme

Les perspectives du marché des engrais n'envisagent pas de baisse des prix. Les impasses de potasse, notamment, sont à prévoir.

Le marché des engrais en 2023 a été bien perturbé avec une diminution des prix après l’envolée constatée ces dernières années. Le point et perspectives avec des experts en la question.

Les perspectives du marché des engrais restent très nébuleuses. Pour le comprendre, il faut revenir un peu en arrière. En 2022, les prix des engrais ont été multipliés par trois. Les raisons sont multiples à ce bond. La guerre en Ukraine et les sanctions avec la Russie ainsi que la hausse de la demande mondiale suite à la reprise après le covid ont fortement pénalisé les agriculteurs dans leurs achats d’engrais. Même si depuis un an, ils ont tendance à diminuer, les niveaux restent élevés.

Prix des engrais : le marché se détend

Dans cette période tourmentée, les perspectives du marché des engrais sont floues. Il est donc parfois difficile de réaliser des achats d’engrais et de faire une prévision. Toutefois, on peut voir qu’en 2023, la baisse des cours des matières premières a profité aux engrais, contre toute attente.

« Le prix du gaz a fini par diminuer car les pays sanctionnés ont tout de même trouvé un accès au marché, rappelle Armelle Gruère, responsable des marchés à l’IFA (International  fertilizer association). Avec de tels niveaux de prix, les pays consommateurs d’engrais comme l’Inde et la Chine ont revu à la baisse leurs achats. » Suffisamment pour créer un peu de stocks malgré les usines au ralenti. La marchandise disponible a détendu le marché.

Une stratégie qui a aussi été appliquée en France et en Europe. Avec un ratio coût de l’engrais, coût de production, les revenus des agriculteurs au niveau mondial ont été pénalisés. « Pour l’azote, la consommation a été diminuée de 5 %, 9 % pour le phosphore et 15 % pour la potasse, chiffre la responsable. En 2023, la consommation devrait se redresser notamment en Asie du Sud et Amérique latine. »

Des perspectives de marché des engrais peu optimistes

En Europe, un quart des importations d’engrais viennent de Russie. « Avec la guerre en Ukraine, les disponibilités sur le marché se sont réduites, précise Fabien Santini, en charge de ce dossier à la Commission européenne. L’utilisation d’azote a alors été réduite de 5 à 10 %, avec de faibles impacts sur les rendements. On les estime en retrait de 0 à 2 % à cause d’une moindre fertilisation. »

En revanche, de nombreuses impasses ont été réalisées sur le phosphore et la potasse. Les experts s’accordent à dire qu’il ne faut pas vivre sur ses acquis et penser à amender, même avec des engrais de fond régulièrement.

Pour les prochaines années, l’association mise sur un retour aux achats des agriculteurs à l’échelle mondiale. Toutefois des risques à court terme existent avec notamment les conditions météorologiques à l’échelle du globe. En effet les phénomènes El Nino et La Nina risquent d’impacter les cultures et de modifier les achats d’engrais des agriculteurs sud-américains.

Réduction de l’utilisation

À moyen terme, l’IFA envisage un ralentissement de la consommation d’engrais. « L’Amérique et l’Asie du sud risquent de tirer la croissance tout de même, estime Armelle Gruère. Mais il faudra rester attentifs car l’Afrique va émerger, tirant sur la demande. C’est bien ce continent qui jouera un rôle clé les prochaines années. »

Du côté de la Commission européenne, les élus ont pour ambition de soutenir les pratiques agronomiques, d’aider au recyclage des produits organiques et d’ajuster les taxes carbone pour les engrais produits en dehors de nos frontières.

C’est donc bien la géopolitique avec les deux thèmes de la sécurité alimentaire et de la protection environnementale qui détermine la consommation d’engrais. Sur ce point de vue-là, l’objectif de décarboner l’agriculture incite les industriels des engrais à revoir leurs processus de production.

« C’est maintenant que nous devons prendre des décisions qui ne seront palpables qu’en 2050, estime Antoine Hoxha, directeur de Fertilizer Europ. D’ici à 2040, nous devons réduire de 70 % nos émissions de gaz à effet de serre. »

Fabrication à moindre impact

Pour cela, les industriels européens ont étudié tous les processus de fabrication pour tenter de réduire ces émissions de gaz. « Nous sommes aux limites de la théorie, nos procédés industriels ne peuvent être plus efficients en matière d’énergie, estime le directeur. La seule solution est de récupérer le carbone pour le stocker tel qu’il est en l’enfouissant. Ou de le transformer en hydrogène. Avec un coût non négligeable. »

Quoi qu’il en soit, l’agriculteur ne doit pas s’attendre à une baisse du prix des engrais que ce soit à court ou à long terme. « D’où l’importance d’actionner tous les leviers possibles pour mieux utiliser l’azote, rappelle Sylvain Pellerin, ingénieur à l’Inrae. Il s’agit d’éviter les pertes lors de l’épandage, de réduire les apports en ajoutant des légumineuses dans la rotation et de mieux recycler l’azote issu des élevages. »

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