Chantiers d’épandage: se rééquiper ou acheter neuf ?

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Chantiers d’épandage: se rééquiper ou acheter neuf ?

L'intérêt d'un rééquipement d'une tonne avec rampe d'épandage ou enfouisseur est à étudier au cas par cas.

Plusieurs groupes équipés de tonnes classiques avec buse palette souhaitent passer à des tonnes avec enfouisseur ou rampe équipée de pendillards. Le choix mérite réflexion. Cas pratique en Vendée.

La cuma de la Mesnardaise présidé par Louis Paul Boudaud, créée en 1984, est située à Mesnard la Barotière (Vendée). Elle rassemble une cinquantaine d’adhérents dont un noyau dur d’une vingtaine d’exploitations engagées sur les principales activités de la cuma (110 000 € de CA / an), parmi lesquelles figurent l’épandage de lisier.

Depuis longtemps, la Mesnardière met à disposition deux tonnes à lisier qui servent à épandre en moyenne 25 000 m3 par an d’effluents liquides issus d’élevages bovins et avicoles.

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C’est précisément en raison de la présence d’élevages de canards dans le groupe que la cuma a été amenée à faire évoluer son activité épandage. En effet, un arrêté concernant les producteurs de volailles pris dans le cadre de l’épidémie d’influenza aviaire (ou grippe aviaire) a renforcé les mesures de biosécurité.

En particulier, les modalités d’épandage du lisier de canards. Dans la mesure où le lisier ne peut être assaini pendant 60 jours minimum dans la fosse, il doit être enfoui via une tonne équipée d’enfouisseurs (disques, dents, coutres circulaires…). Ou bien, il doit être épandu avec des tonnes équipées de pendillards descendant au ras du sol, puis enfoui dans la foulée.

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Louis Paul Boudaud, président de la cuma de la Mesnardaise, en Vendée.

Après un débat entre les adhérents engagés dans cette activité, le groupe a tranché : on arrête les tonnes avec buse palette ! Même les éleveurs sans poulaillers se sont ralliés à cette position en considérant que tôt ou tard, l’ensemble des agriculteurs seront amenés à cesser l’épandage ‘aérien’ du lisier. Cette décision prise en 2018 a été encouragée par l’octroi d’une subvention de 40% (PCAE) sur les équipements d’épandage, complétée par l’aide financière du syndicat Vendée Eau de 20%. Quant au dpa, il a été subventionné à 40% en raison de la présence dans le groupe d’élevages soumis à la directive IED.

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Neuf et rééquipement pour les chantiers d’épandage

Arnaud Bremand, le trésorier, a mis les chiffres sur la table avant de décider. Acheter ou neuf ou se rééquiper ? C’est finalement une voie médiane qui a été choisie :

  • achat d’une tonne neuve Pichon TCI 15 700 l, deux essieux (dont un suiveur) avec un broyeur-répartiteur et une rampe de 12 m, équipée de 40 descentes en tuyaux de 50 mm, doublée d’un système dpa (débit proportionnel à l’avancement) ;
  • et rééquipement d’une tonne à lisier Pichon TCI 11350, un essieu, achetée par la cuma en 2011, avec ajout d’un enfouisseur composé de 8 disques polyvalents de 4 m de large, et installation d’un dpa. Les deux tonnes sont équipées d’un bras de pompage et d’un accélérateur de pompage et sont chaussées de pneus basse pression. Il est à noter que la cuma la Mesnardaise avait pris soin, lors de ses derniers investissements en tonnes à lisier, de les pré-équiper pour qu’on puisse y adjoindre éventuellement une rampe ou un enfouisseur (chape d’attelage préfixée). « Notre tonne de 11 400 litres était encore en bon état, du point de vue de la cuve galvanisée comme du châssis. De plus, nous venions de renouveler le compresseur » expliquent le président et le trésorier, pour qui le rééquipement semblait jouable.

Cela a nécessité environ trois jours de travail au concessionnaire pour effectuer l’installation (accrochage de l’enfouisseur avec le système de relevage couplé, connexion du boîtier, branchements électriques et hydrauliques…). Un surcoût supplémentaire s’est rajouté lors de la mise en place du dpa : la cuma a dû remplacer la porte arrière existante sur la tonne par une autre porte (forme concave à l’intérieur de la tonne) entraînant un surcoût de 800 €.

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Répondre aux besoins d’épandage

La présence de deux systèmes dans la cuma permet de répondre aux divers besoins des adhérents. Ceux qui ne disposent pas d’une puissance de traction importante (environ 150 cv sont nécessaires pour la grosse tonne), choisissent la tonne de 11 300 litres. Idem pour ceux qui veulent enfouir immédiatement le lisier. Cela évite de passer après l’épandage un outil de type cover-crop. En termes de débit de chantier, il n’y a pas photo entre les deux tonnes puisque la plus grosse atteint un débit de 2 500 à 3 000 l/minute, contre 1 000 à 1 500 pour la plus petite. 

Dans un souci de simplification, la cuma souhaite maintenir un prix tarif unique facturé au mètre-cube, quelle que soit la tonne utilisée. Objectif : 0,90 à 1 € maxi par m3 (hors traction et main d’œuvre).

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Peu de cuma optent pour un rééquipement des tonnes existantes.

Impact financier

Le surcoût lié aux équipements d’épandage n’est pas neutre : 27 550 € pour la tonne rééquipée avec enfouisseurs, et 30 950 € pour la tonne neuve avec pendillards. Mais après subventions, ce surcoût descend à 13 000 € dans le premier cas et 14 120 € dans le second. Du point de vue comptable, le poids des charges d’amortissement calculées dans cette cuma sur cinq ans sera différent entre les deux tonnes :

  • la tonne de 11 350 l achetée 31 800 € en 2011 étant déjà amortie comptablement, seule l’acquisition du système d’enfouisseur et du dpa constitue une charge amortissable, soit 27 750 € ;
  • la tonne de 15 700 l génère une charge totale amortissable (tonne toute équipée avec pendillards et dpa) de 78 200 €.

Conformément à la règlementation, la cuma a pu ‘amortir’ 50% des subventions reçues, en déduction de l’amortissement du matériel.

Prix de revient supérieur

selon les observations du réseau cuma sud-ouest, les tonnes à lisier équipées de pendillards ou enfouisseurs ont un prix de revient plus élevé. Cela s’explique d’abord par un montant d’investissement plus élevé (plus de 16 000 € de différence dans l’échantillon étudié). d’autre part, le coût d’entretien/réparation comptabilisé par voyage est nettement supérieur. « Le poste ‘entretien’ s’accroît avec l’âge et double au-delà de 4 ans. Ceci est lié en partie au changement des pneumatiques et aux systèmes d’épandage » analysent les conseillers cuma en agroéquipement du sud-ouest.

 

Prix de revientet cout tonnes à lisier cuma

Valeur fertilisante 

Enfin, les adhérents de cuma sont unanimes pour considérer que l’investissement dans ces nouveaux équipements est compensé en partie par une meilleure valorisation fertilisante du lisier. En effet, la volatilité de l’azote ammoniacal est fortement réduite par rapport à un épandage avec buse palette. D’autre part, avec le dpa, les adhérents de Mesnardaise ont désormais la garantie d’apporter la juste dose partout.

Épandage : des contraintes au rééquipement

Les conseillers en agroéquipement du réseau cuma de l’ouest attirent l’attention sur les contraintes propres au rééquipement.

Jusqu’ici peu de cuma ont fait le choix d’opter pour un rééquipement de la tonne à lisier existante avec une rampe ou un enfouisseur neuf. La grande majorité préfèrent carrément renouveler leur tonne ou compléter leur parc avec une tonne déjà équipée. D’emblée, certaines caractéristiques techniques conditionnent en effet cette option : configuration du châssis, position du ou des essieux par rapport au report de charge dû à l’équipement arrière, etc.

C’est pourquoi, la décision de rééquiper une tonne à lisier d’une rampe avec pendillards ou enfouisseur ne pourra être valablement étudiée que pour les cuma propriétaires d’une tonne à lisier dotée d’un pré-équipement de base et suffisamment récente pour justifier une telle opération. Pour cette catégorie de cuma qui seraient sollicitées par des demandes d’adhérents, la question d’un éventuel rééquipement est légitime, sachant que la règlementation agro-environnementale tend à se durcir.

On évoque à terme l’application de mesures ‘anti-ammoniac’ en cas de risques de pollution de l’air. Dans ce contexte, la reprise des tonnes avec buse palette ne vaudrait plus grand-chose sur le marché de l’occasion. Opter pour le rééquipement ne peut se défendre que si le coût de l’adaptation ne revient pas plus cher que l’achat d’un tonne neuve. Or, chaque projet est différent. Sur cette question, le constructeur Jeantil se montre prudent. Pour lui, il est impossible de dire à l’avance si le jeu en vaut la chandelle puisque chaque tonne représente un cas de figure à part.

Une note salée

Exemple : si la longueur de la rampe demandée est supérieure à 15 m, alors il faudra deux broyeurs répartiteurs. Et si l’on souhaite par la même occasion rajouter un système DPA, cela va encore compliquer le projet. Au-delà du coût des équipements et des possibilités de compatibilité d’ordre mécanique, électronique ou hydraulique, il faut bien sûr aussi compter sur le temps de travail nécessaire en atelier pour effectuer l’adaptation.

À raison de 40 à 50 euros par heure de main d’oeuvre, cela va forcément impacter la note. Si une seule demi-journée d’intervention suffit ou s’il faut prévoir une semaine, cela change tout. Rajoutons aussi les frais de transport en camion (de l’ordre de 1,5 à 2 euros par kilomètre).

« La question du rééquipement est une vraie question, mais je pense que la plupart des clients préféreront changer de tonne » pronostique Philippe Jeantil, PDG de l’entreprise. Pour les anciennes tonnes équipées de buse palette, le constructeur évoque leur reconversion pour le transport de lisier dans le cadre de ravitaillement de chantiers d’épandage.


Les épandeurs à fumier aux Rayons X

Cet article et ses données sont issus d’un travail d’enquête et d’étude économique publié dans l’univers Rayons X d’Entraid’. Dans le cadre de ce dossier, 4 épandeurs ont été analysés.

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Sodimac Rafal 3300 : prix d’achat et coût d’entretien

Jeantil EVR 14-12 : prix d’achat et coût d’entretien

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