Le projet sur Miimosa « Émergence bio: une réussite collective et solidaire »
En Auvergne-Limousin, c’est compliqué de trouver des partenaires pour relayer les campagnes de crowdfunding», grogne Jouany Chatoux, membre de l’équipée «Emergence Bio». En plein cœur du plateau de Millevaches, à Pigerolles, les exploitations membres du collectif font le pari osé de toutes inter-déprendre les unes des autres. Poulaillers et serres chauffés grâce au méthaniseur alimenté par 4 exploitations et la communauté de communes, une ferme-auberge, du circuit court, un bassin de rétention. Dans le brouillard automnal qui enrobe le plateau limousin, il souffle ici un air de renouveau, d’entreprise collective qui veut voir loin.
Projet “clé en main” pour Miimosa
Le projet ne date pas d’hier (2013). Et les six agriculteurs sont désormais dans le dur. Le méthaniseur fonctionne depuis cette année. Le bassin de rétention n’a plus qu’à recevoir les traitements, les serres devraient être terminées d’ici un mois. Avec des emprunts conséquents liés à l’ampleur du projet, les derniers besoins en financement devaient passer par un créneau autre que la banque. «On connaissait déjà le système du crowdfunding, on attendait juste le bon moment», explique Jouany, éleveur de Limousines et porcs culs noirs.
Leur campagne de levée de fonds aura duré 60 jours. Elle s’est terminée le 30 septembre. Sylvie, se dit un peu «déçue» du résultat. Même si le Gaec, porteur du projet, a dépassé ses objectifs: 18.000 au lieu de 15.000€. Ils avaient d’abord opté pour Bulb In tOwn mais il n’y avait pas de relais en Limousin. «BulB In tOwn a cherché à nous faire aller vers le lending et Miimosa a fait un peu de forcing pour nous avoir», avoue Jouany.
A chaud, ils voient davantage les choses qui n’ont pas été concluantes que les points positifs. «Ils n’ont pas vraiment relancé leurs partenaires», regrette Jouany. Le projet était pourtant bien ficelé. D’abord au niveau communication car ils avaient remporté, en 2013, l’appel à projet du ministère de l’Agriculture, «Produire autrement», pour la labellisation des premiers GIEE. Ce bon départ leur avait permis de profiter de fonds Casdar pour réaliser un film de promotion. Sylvie a ensuite travaillé son récit et les photos pour que le projet soit bien compris des potentiels donateurs. «Pour Miimosa, c’était clé en main», assure Jouany.
60 jours: trop court pour toucher les entreprises
Dans ce contexte, la plate-forme ne leur apparaît pas forcément le meilleur outil pour aller chercher les donateurs. Le collectif aurait souhaité que la campagne dure 90 jours mais Miimosa a insisté sur 60. «Certaines entreprises étaient prêtes à donner mais avec les vacances d’été et les réunions nécessaires, le chèque de 1000 euros n’a pas quitté le bureau», renchérit Sylvie. Par ailleurs, entre la préparation, le lancement, les 60 jours de campagne et l’après, l’investissement humain a été important «pour au final, ne toucher vraiment que notre réseau. Seules 6 personnes sur les 132 donateurs en sont extérieurs», pointe-t-elle. Cette jeune mère de famille à 150% dans ce projet de territoire montre avec un certain dépit les fichiers excels que Miimosa vient de lui envoyer pour qu’elle s’occupe désormais des contreparties. «Ils prennent une commission de 8% pour au final ne pas s’assurer que leurs partenaires communiquent autour de la campagne et pour ne pas nous aider ensuite», déplore l’agricultrice. Quoiqu’il en soit, le travail se poursuit. L’algéco a ouvert début octobre pour accueillir les prémices de la future ferme-auberge en dur. Le collectif Emergence Bio garde le cap pour atteindre son but ultime: la résilience de ses fermes.
Quel don, pour quelle contrepartie?
«Nous nous sommes aperçus pendant la collecte, que les donateurs ne savaient pas combien donner, quelle que soit la somme, ils étaient gênés! Ceux qui donnent beaucoup, passent pour des « pleins de fric » alors que nous, nous savons que ce n’est pas le cas, et les autres semblaient avoir honte de donner, je les cite, « seulement 20 ou 50 ou 75 euros … » C’est parce qu’ils ne savaient pas comment se placer que beaucoup n’ont rien donner», explique Sylvie qui a passé un message sur facebook en expliquant que «les petites rivières faisaient les grands fleuves» et qu’il n’y a pas de petit don. «Si je devais relancer un financement participatif, je serais beaucoup plus vigilante sur ce phénomène et ferais des contreparties très ciblées», conclut-elle.
Tendance des dons des 132 contributeurs
Le collectif Emergence Bio Pigerolles est un village de 60 habitants, à 900 mètres d’altitude au cœur du Parc Naturel de Millevaches, proche du lac de Vassivière. Emergence Bio c’est trois exploitations bien différenciées les unes des autres (élevage bovin-ovin-porcin, maraichage sous serres chauffées, aviculture) et une SARL de transformation. Au pied du bâtiment des Limousines, il y a un méthaniseur, alimenté par 4 exploitations et la communauté de communes. L’énergie créée sert à alimenter les serres, les poulaillers, le séchoir à grains et le bâtiment de la ferme-auberge. Le collectif avait participé à l’appel à projet «Produire Autrement» du ministère de l’Agriculture et a été labellisé GIEE par la suite. En étant lauréat de ce concours, ils ont obtenu des fonds Casdar qui leur ont permis de financer un film de présentation, visible sur youtube. |