Motorisation agricole : le tracteur de demain utilisera de nouvelles énergies

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Motorisation agricole : le tracteur de demain utilisera de nouvelles énergies

John Deere teste différents carburants sur ce tracteur MultiFuel.

C’est la fin du tout diesel pour la motorisation agricole. Le groupe John Deere travaille à la fois sur l’amélioration du bilan des moteurs à explosion, y compris avec de nouveaux carburants, et sur les technologies électriques ou hybrides. Le motoriste Deutz, quant à lui, continue également de perfectionner le moteur à explosion tout en développant une branche tournée vers la propulsion électrique et l’hydrogène.

L’un est américain, l’autre européen, et les deux font partie des grands du moteur. Il était donc intéressant de connaître leurs visions respectives de l’avenir de la motorisation agricole. Qu’en disent les groupes John Deere et Deutz ? Le premier s’est donné comme objectif de réduire son empreinte carbone de 30 % à l’horizon 2030, selon le “scope 3”. C’est-à-dire en prenant en compte la consommation de ses machines sur l’ensemble de leur durée de vie. Un gros challenge auquel participe naturellement sa filiale moteurs, John Deere Power Systems.

Quatre piliers de développement

Nicolas Marie, son directeur développement produit, explique comment. « Notre projet s’appuie sur quatre piliers : développer un moteur à combustion interne plus efficient, rechercher des carburants plus durables, utiliser l’hybridation, et introduire la motorisation purement électrique ».

C’est donc la fin du moteur diesel en tant que solution unique, au profit de réponses plus ciblées. Ces orientations prennent en compte trois contraintes : leur dimension développement durable, leur coût et enfin les aspects pratiques de leur mise en œuvre. Nicolas Marie souligne en particulier la question de l’autonomie des véhicules. Elle est en effet déterminante pour des agriculteurs qui partent travailler toute une longue journée.

L’huile végétale hydrogénée prometteuse

Du côté des carburants pour moteurs à combustion interne, John Deere a étudié de nombreuses solutions par le passé, mais aujourd’hui, deux pistes ont sa préférence. « La HVO, huile végétale hydrogénée, nous paraît intéressante car elle demande très peu de modifications sur les moteurs. D’autre part, son prix commence à se rapprocher de celui du gazole. Et, enfin, la pureté de ce produit protège les moteurs, contrairement à ce que nous avons observé avec l’huile végétale pure, qui présente un certain nombre d’inconvénients sur ce point. L’éthanol offre aussi des perspectives mais plutôt sur des moteurs de type essence, et sur le marché américain (Nord et Sud). En France, nous travaillons également sur la faisabilité de l’hydrogène, dans le cadre d’un projet avec plusieurs partenaires locaux. » Notre interlocuteur pointe toutefois l’encombrement des réservoirs d’hydrogène, de même d’ailleurs qu’avec le biométhane.

Deux modes d’hybridation pour la motorisation agricole

L’hybridation pourrait quant à elle apporter des réponses pour certains types de véhicules. Cette notion recouvre deux formes. Soit un moteur à combustion interne plus petit que sur la machine standard, mais épaulé par un moteur électrique sur batterie. Cette dernière est rechargée durant les phases de faible besoin en puissance. Soit un moteur pour lequel on électrifie l’entraînement des accessoires tels que le turbo ou la pompe à eau. Ils sont entraînés indépendamment du régime moteur, ce qui s’avère très utile dans le cas du turbo.

motorisation agricole de demain

La batterie Kreisel exposée au Sima : 400 kg et plus de 1 m de largeur pour 173 Ah.

L’électrique en dessous de 100 kW

Enfin, en ce qui concerne la motorisation 100 % électrique, elle a pris place dans la panoplie John Deere en 2022 à la faveur d’une prise majoritaire dans la société Kreisel Electric par le groupe. « Cette technologie a vocation à croître, précise Nicolas Marie, aussi bien pour les applications en interne que pour la vente à des constructeurs extérieurs. Mais elle présente peu d’intérêt pour l’instant au-delà de 100 kW, en raison du poids des batteries et de l’autonomie. Ainsi, chez John Deere, elle concernera plus des tracteurs tondeuses que des tracteurs agricoles. » Il cite à ce propos l’exemple d’un modèle comme le 6250R : pour l’électrifier en conservant une autonomie décente, il faudrait doubler son poids. Sans compter la durée de recharge !

Précisons que l’usine John Deere de Saran (Loiret) va accueillir prochainement une unité de fabrication de batteries, pour ces futures applications. Un bon complément à la production de moteurs diesel de ce site historique. Ils équipent aujourd’hui de nombreuses gammes de la marque américaine (tracteurs, moissonneuses-batteuses, engins forestiers, etc.), et les matériels de clients extérieurs (tracteurs Claas, groupes électrogènes Kohler-SDMO, etc.).

Deutz cultive ses classiques et passe au vert pour la motorisation agricole

Le fabricant de moteurs Deutz, basé en Allemagne à Cologne, a quant à lui largement diversifié ses activités au cours des dernières années. L’hydrogène, l’électrique et les carburants synthétiques font progressivement leur entrée dans les bureaux d’études, comme nous l’ont expliqué les dirigeants de la filiale française, Frantz Perre (directeur général), Scott Hingley (directeur commercial) et Adrien Legait (ingénieur commercial). À l’horizon 2050, l’entreprise vise la neutralité carbone, et elle estime disposer déjà d’un portefeuille de solution permettant d’affronter les vingt prochaines années.

batterie DEUTZ PowerTree

La station de recharge de chantier Deutz PowerTree.

Une motorisation agricole plus sobre et plus propre

La société Deutz n’est plus un simple fabricant de moteurs diesel, et elle le formalise à travers une stratégie baptisée Dual +. D’un côté, elle cultive sa branche historique, dite Classic Deutz, mais avec l’ambition de concevoir des moteurs à combustion interne toujours plus sobres et plus propres. Ainsi, les versions Stage V sont déjà compatibles avec la HVO (huile végétale hydrogénée), ou, moyennent de légères adaptations, avec le B100 (équivalent du Diester français).

Mais la gamme potentiellement adaptée à la motorisation agricole comprend également des moteurs à gaz, pouvant donc valoriser du biométhane. Pour financer les lourds efforts de développement, Deutz a d’ailleurs signé des accords avec des confrères, comme tout récemment avec Daimler. Fin 2020, c’était avec John Deere Power Systems, et la nouvelle série TCD 3.9 en découle d’ailleurs.

Prêt pour le 100 % électrique

Le second volet de la politique du motoriste allemand a pour nom Green Deutz. Plusieurs briques constituent cet ensemble. C’est d’abord la proposition de solutions 100 % électriques pour motoriser des véhicules, avec les batteries et leur contrôle ainsi que la chaîne cinématique.

L’entreprise s’appuie pour cela sur les technologies acquises suite au rachat de deux spécialistes de ces domaines, Torqeedo en 2017 et Futavis en 2019. Pour des raisons d’autonomie et de poids des batteries, Deutz réserve les solutions 100 % électriques aux petites puissances, jusqu’à 100 kW. C’est ce qu’on observe aujourd’hui en automobile, où les premières à en être dotées sont les petites citadines. Dans le secteur agricole, le valet de ferme serait sans doute le premier engin motorisé à se convertir à l’électrique.

Pour alimenter les batteries de ces nouveaux véhicules en tout lieu, Deutz a présenté récemment son PowerTree. Il s’agit d’un bloc de batteries installé dans un container industriel de 3 m par 2,50 m par 3 m et pesant 4,5 t, d’une capacité de 126 kWh et facile à déplacer.

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Le moteur Deutz à hydrogène sortira en 2024.

Un moteur à hydrogène en 2024

L’hydrogène constitue une autre source d’énergie de la voie verte pour la motorisation agricole. Ainsi, Deutz a développé un moteur à combustion interne spécifique, de 220 kW, le TCG 7.8 H2. Il arrivera sur le marché en 2024, mais quelques exemplaires tournent déjà, notamment sur un groupe électrogène relié au réseau de la ville de Cologne et prochainement sur un camion de 18 t. L’hydrogène apparaît comme une bonne solution pour stocker l’électricité renouvelable excédentaire, par électrolyse.

Dans l’hypothèse de le valoriser ensuite pour animer des véhicules, l’entreprise considère qu’il vaut mieux passer par ce genre de moteur plutôt que par une pile à combustible qui alimenterait un moteur électrique. En effet, cette dernière exige une plus grande pureté du gaz et s’avère plus sensible à l’environnement de travail.

La société Deutz va investir plus de 100 millions d’euros dans les trois ans pour assurer sa transition vers la neutralité carbone. Pour sa filiale France, qui compte environ 70 employés, ces évolutions constituent un profond changement en raison de la somme de nouvelles compétences à acquérir, tant côté ventes en matériel neuf que pièces et SAV. En ce qui concerne les distributeurs partenaires, qui étaient tout autant concentrés sur la motorisation diesel, le challenge est le même.

Pour plus d’informations, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com.

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